Zoran Lukenic a eu mille vies. Des expériences multiples qui l’ont amené aujourd’hui à lancer son concept Ymagine au sein de la boutique à l’essai Tarmac développée via le programme Action Cœur de Ville.
Porté par la Ville d’Autun, ce plan de redynamisation du centre-ville est à destination des porteurs de projets commerçants. Le but : challenger un concept et lui donner toutes les chances de réussite et de pérennisation pour l’avenir. Et la première enseigne à s’est installée au n°9 de la rue de l’Arbalète est Ymagine, sise là pour 6 mois au total, jusqu’à la fin de l’année 2024.
Un mot sur Zoran…
Diplômé d’infographie, l’entrepreneur autunois a d’abord évolué dans le secteur la publicité, puis en tant que sauveteur en hauteur dans les parcs d’attraction avant de travailler pour plusieurs grandes entreprises parisiennes. Il a ensuite monté plusieurs sociétés, dont une d’informatique et une autre dans le webmarketing pour lesquelles il travaille encore aujourd’hui et qui ont toute pour point commun une même vision : des solutions sur-mesure, une sensibilisation et le côté humain ramenés au cœur de chacune de ces activités.
On pourrait décrire Zoran – si c’est possible – comme un entrepreneur du numérique, soucieux de mettre l’humain au cœur de son activité et militant de la liberté. Zoom sur le nouveau concept Ymagine qui a ouvert ses portes il y a quelques mois à Autun… Et sur son créateur hors du commun.
1. Comment est né Ymagine ?
« C’est un concept qui est né il y a un an et demi, surtout dirigé sur les tapis de réalité virtuelle. À ce jour, en France, ça n’existe pas, alors on s’est dit que c’était vraiment un produit d’avenir, quelque chose de novateur et qui permet de franchir un pas dans la réalité virtuelle.
À l’époque j’étais en phase de négociation pour acquérir un local, et c’est à ce moment-là qu’est arrivé Tarmac. C’était à Mars Bleu : on avait emmené des tapis pour que les gens puissent tester notre concept. C’est là que Cathy Nicolao-Verdent (ndlr, 1e adjointe au Maire d’Autun) a pu voir nos expériences, et elle a été bluffée.
Si j’ai ouvert une salle à Autun – en plus de la première salle situé à Caen – c’est parce que j’y habite depuis plus de deux ans et que j’entends tout le monde dire qu’Autun ça ne bouge pas assez. Si on veut que les choses bougent, il faut les bouger ! Alors avec la participation de la Mairie, je me suis lancé, avec le soutien de Cathy Nicolao-Verdenet qui m’a beaucoup motivé avec cette possibilité de la boutique à l’essai Tarmac. »
2. Le tapis virtuel… Qu’est-ce que c’est ?
« Le principe du tapis virtuel, c’est de venir vous sécuriser avec un harnais. On vous installe au centre du tapis avec un casque sur la tête et vous êtes projeté dans un univers virtuel où tous les mouvements que vous allez faire seront recopiés.
Les mains et les mouvements des bras sont récupérés par les manettes, les mouvements de tête sont récupérés par le casque (ça tout le monde sait le faire), mais là où on apporte une vraie plus-value, c’est que le tapis va récupérer tous vos mouvements de pas. Vous pouvez donc marcher, courir, vous baisser, sauter et vous assoir : nos tapis dernière génération sont équipés de strapontins.
Ça apporte une vraie liberté dans l’univers 3D que vous ne pouvez pas retrouver ailleurs. Dans la boutique qui fait 60 m², je peux accueillir 10 personnes dans un endroit sécurisé, sur 3 m², sans risque de collision. À aucun moment l’utilisateur ne peut se cogner ou cogner quelqu’un d’autre. »
3. Pouvez-vous nous parler des « expériences » que vous proposez de vivre à travers la réalité virtuelle ?
« Dans notre approche, on n’est pas orienté jeu vidéo mais plutôt expérience. On crée des univers type escape game, laser game ou balade. On est vraiment intergénérationnel. L’une des dernières expériences qu’on a développée s’appelle Omaha Memories. C’est une expérience où vous suivez les souvenirs d’un soldat de la seconde guerre mondiale qui a débarqué à Omaha Beach en Normandie. Ce n’est pas un jeu de guerre, vous suivez vraiment une tranche de vie, une poésie. On s’oriente dans cette ambiance-là : de la sensibilisation et des expériences inclusives.
On a de petites expériences solo, des balades de cinq minutes pour les personnes qui n’ont jamais fait de réalité virtuelle et qui ont envie de tester. On a aussi des jeux de tir à l’arc ou de bataille de boules de neige. À côté de ça, on a aussi des escape games à plusieurs, de deux à cinq personnes. L’Homme en Noir par exemple, est un univers dans un manoir des années 1960 où il se passe des choses étranges. C’est un jeu qui plaît beaucoup : les joueurs sont ici dans la même pièce, communiquent entre eux et expérimentent ensemble.
Notre produit phare, c’est un laser game dans un univers post apocalyptique. Vous évoluez dans l’arène d’une ville dévastée, vous vous y baladez avec différents personnages, différentes armes. Mais aucune de nos expériences c’est violente, au contraire. On a tout fait pour qu’il n’y ait pas de sang, pas de langage dur pour que même les petits puissent jouer et que nos expériences restent accessibles à tous.
Ce dimanche, on lance le premier jeu de réalité virtuelle pour les malvoyants et les aveugles. Il n’en existe pas à ce jour. Avec nos tapis, la personne malvoyante peut courir, se déplacer et sauter sans risquer de se blesser ou de blesser quelqu’un. Il y a une dimension de liberté dans les expériences que l’on propose de vivre.
Nous avons un studio de développement qui nous permet de créer nous-même toutes les expériences que vous verrez chez Ymagine. Notre studio a justement cette direction idéologique d’inclure tout le monde. Par exemple, toutes nos expériences sont accessibles aux personnes à mobilité réduite (PMR).
Dans tous mes projets, j’introduis toujours la même démarche d’apporter aux gens d’autres visions, d’autres façons de voir et de faire. Je veux apporter de la liberté : la liberté de mouvement dans les tapis et cette liberté de faire voyager les gens n’importe où. Le mot liberté est transverse à toutes mes activités. »
4. À qui s’adressent ces expériences ?
« On accueille vraiment tous types de personnes. Des jeunes qui sont déjà sensibles à la VR (réalité virtuelle), mais aussi beaucoup de curieux et des professionnels également.
On pourrait aussi toucher les EHPAD car les tapis sont équipés d’un harnais avec une double ceinture mais aussi d’un strapontin. Les personnes âgées peuvent donc être assises et faire des activités, de l’exercice avec les bras, les jambes. Ça leur permet de s’évader, de voir quelque chose qui n’est pas commun en plus d’être ludique.
Comme pour Mars Bleu, on fait aussi du sur-mesure. Notre première cliente était une dame de plus de 80 ans. Elle a voulu faire une expérience et elle s’est éclatée. Elle a fait une balade et m’a dit qu’elle aimait voler, qu’elle aimerait être un aigle. Je lui ai proposé de repasser un peu plus tard et j’ai demandé à mes équipes de chercher des images ou des vidéos en 360° autour de ça. Quand elle est revenue, je lui ai fait tester : elle était ravie. »
5. Quels sont les projets pour la suite ?
« Aujourd’hui, les tapis de réalité virtuelle sont fabriqués par un prestataire asiatique avec lequel nous collaborons. L’une des ambitions du futur serait d’ouvrir suffisamment de salles et d’acquérir une notoriété dans ce milieu-là qui nous permettrait de faire une levée de fonds pour développer nos propres tapis. On a aujourd’hui la matière grise pour le faire, mais il nous manque les ressources.
Pour ce qui est de la boutique et de Tarmac, on doit faire un premier bilan le mois prochain avec la Mairie pour parler de la suite du projet : est-ce qu’on continue avec Tarmac, en direct avec le propriétaire des locaux ou dans un autre local ailleurs.
Avec Ymagine, on a quand même déjà obtenu une première victoire : celle de faire déplacer des jeunes de Dijon, qui ont déjà tout sous la main, mais qui sont venus à Autun pour vivre cette expérience unique parce qu’ils ne peuvent pas la vivre ailleurs. C’est très encourageant et prometteur !
Mon projet à terme, ce serait de pouvoir garder le local rue de l’Arbalète. C’est un vrai coup de cœur parce que j’ai appris qu’historiquement, avant d’être une boutique de vêtements, en remontant encore plus loin, c’était une boutique de jeux vidéo. Plusieurs personnes sont venues me voir en disant qu’elles venaient là, plus jeunes, pour jouer aux jeux d’arcade et au babyfoot. Il n’y a pas de hasard, ça fait sens pour moi, et c’est une manière de remettre Autun telle qu’elle était avant, à l’époque où il y avait beaucoup plus d’habitants.
Une autre petite victoire, ce sera aussi quand quelqu’un d’autre ouvrira quelque chose sur Autun autour du jeu, de la VR ou du jeu classique. J’aurais l’impression d’avoir participé à la dynamisation de quelque chose. C’est un défi personnel : ouvrir une boutique ici c’est avant tout pour moi un acte militant pour dire qu’il y a du potentiel à Autun et que la ville gagne à être connue et à ce qu’on y investisse des projets. »